«Nous vivons dans une nouvelle ère de politique de puissance»

La situation économique de la Suisse à l’ère «Trump 2»

par Rudolf Strahm*

(19 septembre 2025) Les droits de douane imposés par M. Trump frappent durement la Suisse, mais ce n’est pas une surprise. Rudolf Strahm analyse la situation et demande que les exportations d’or de la Suisse soient immédiatement retirées de la balance commerciale et que la politique commerciale soit repensée à long terme, en fonction des nouvelles réalités mondiales.

Rudolf Strahm.
(Photo rudolfstrahm.ch)

Les droits de douane élevés imposés par M. Trump sont le signe de l’injustice du plus fort. Mais ils nous signalent également les manquements de la politique suisse. S’ensuivent alors consternation et fausses accusations. Cependant, le protectionnisme commercial américain et la doctrine nationaliste «Make America Great Again» sont des symptômes indéniables du déclin économique des Etats-Unis.

Les «droits de douane punitifs» de Trump – une réalité annoncée depuis longtemps

Lorsque Donald Trump a proclamé en avril 2025, dans la roseraie de la Maison Blanche, le «Liberation Day» pour les Etats-Unis et présenté une longue liste de pays soumis à des droits de douane supplémentaires sur les importations américaines – 31% pour les livraisons suisses, par exemple –, nos autorités se sont alarmées pour la première fois. Auparavant, elles se considéraient comme un cas particulier et un «ami spécial» de la «république sœur» américaine.

Mais les responsables de la politique économique rappelaient depuis longtemps déjà le premier mandat présidentiel de M. Trump, lorsque la Suisse avait dû se justifier auprès des autorités monétaires américaines en raison de son excédent commercial. En réalité, nous connaissions déjà l’année dernière les projets du gouvernement de la «Heritage Foundation», une fondation nationale conservatrice. Après l’élection de Trump, celle-ci avait promis de réduire le déficit commercial astronomique des Etats-Unis, qui s’élève à plus de 1200 milliards de dollars (2024), au moyen de droits de douane et d’une politique protectionniste musclée. Mais ce n’est qu’après le coup de massue du «Liberation Day» que notre gouvernement a pris au sérieux les plans de Trump. La présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter et le ministre de l’Economie Guy Parmelin se sont rendus aux Etats-Unis et ont cherché dès le mois de mai à s’entretenir avec Trump et le ministère des Finances. C’était une réaction raisonnable et compréhensible. Mais qu’auraient-ils pu faire d’autre?

Exportations suisses d'or vers les Etats-Unis.

La Suisse a ignoré la «malédiction de l’or»

La cause principale, déjà visible mais largement occultée, de l’augmentation des exportations suisses vers les Etats-Unis a été ignorée, à savoir l’explosion des exportations d’or. Elles avaient triplé depuis l’élection de Donald Trump et atteint le chiffre fabuleux de 476 tonnes de lingots d’or au premier semestre 2025.

La Berne fédérale ne voulait pas déranger les quatre raffineries d’or et leurs investisseurs étrangers et ne souhaitait pas rendre publiques les activités de fusion, de raffinage et de négoce de l’or. Cette protection de la place financière est une tradition. Voici les quatre négociants en or qui, ensemble, traitent plus d’un tiers du commerce mondial de l’or: Metalor à Neuchâtel, ainsi que Argon-Heraeus, Valcambi et MKS Pamp au Tessin. Leurs exportations précipitées d’or vers les Etats-Unis ont été la cause principale du «cas particulier de la Suisse» dans l’explosion de l’excédent commercial à partir de novembre 2024 et en particulier au premier semestre 2025.

Rien qu’au premier semestre 2025, les quatre négociants en or ont exporté pour 38 milliards de francs d’or vers les Etats-Unis, soit 52% du total des exportations gonflées (72 milliards de francs). Les déficits commerciaux des Etats-Unis vis-à-vis de la Suisse en 2024 et 2025 ont (prétendument) servi de base de calcul pour les «droits de douane punitifs» de M. Trump. Comme par le passé, le commerce de l’or est devenu une «malédiction aurifère».

Excédent commercial suisse avec les Etats-Unis.

Négligence dans les départements

Pourquoi les Etats-Unis ont-ils importé autant de lingots d’or de Suisse en si peu de temps? C’est précisément l’incertitude créée par Trump après son élection et la crainte d’une chute encore plus forte du dollar qui ont fait monter en flèche la demande de lingots d’or à Wall Street et auprès des investisseurs très riches. Aux Etats-Unis, le commerce et le stockage de lingots d’or d’un poids de 1000 grammes ou 100 onces sont courants, tandis qu’en Europe, le lingot de 400 onces est la norme. Il a donc fallu acheminer par avion des tonnes d’or depuis Londres et les refondre en Suisse pour les exporter vers les Etats-Unis.

En Suisse, les lingots d’or refondus selon la norme américaine sont comptabilisés comme marchandises dans la balance commerciale des exportations de marchandises. Comme l’ont confirmé des demandes de renseignements, personne au Département fédéral des finances et au Seco n’avait pensé à une correction, à un transfert ou à une séparation statistique des exportations d’or. On pourrait également retirer les exportations d’or pur de la balance commerciale des marchandises et les comptabiliser comme mouvements de capitaux, comme le fait la Banque nationale.

Une enquête menée par le rédacteur d’«Infosperber», Urs P. Gasche, a révélé que même les directives de l’ONU et du FMI laissent une certaine marge d’interprétation et d’appréciation dans la comptabilisation des exportations d’or dans les statistiques du commerce extérieur. Par exemple, l’or n’est pas inclus dans le total conjoncturel du commerce extérieur. En tant que trafic de perfectionnement douanier, il pourrait également être retiré des statistiques du commerce extérieur, car la refonte n’est pas une valeur ajoutée industrielle. Avec une planification prévisionnelle, il aurait peut-être suffi de modifier rapidement l’ordonnance sur les statistiques du commerce extérieur.

Cette insouciance et cette négligence de la bureaucratie fédérale à Berne ont été à l’origine de la «malédiction aurifère» dans la balance commerciale avec les Etats-Unis. Au second semestre 2025, les exportations d’or vers les Etats-Unis se sont (au moins temporairement) presque entièrement effondrées. L’administration Trump a suspendu (temporairement?) les droits de douane américains sur les importations d’or en raison des protestations des investisseurs et de Wall Street. Mais lors de la prochaine crise monétaire, le jeu recommencera.

Il faut exiger que la bureaucratie fédérale fasse immédiatement tout son possible pour retirer les exportations d’or de la balance commerciale. En effet, il faut s’attendre à ce que les turbulences monétaires et les pics d’exportation d’or se reproduisent à l’avenir. Le Conseil fédéral pourrait éventuellement faire appel à la Banque nationale pour les transferts d’or (son or monétaire n’est pas comptabilisé comme exportation de marchandises). Ou bien, si nécessaire, malgré les protestations du Tessin et de Neuchâtel, la refonte des lingots d’or britanniques pourrait être délocalisée à l’étranger et les transferts effectués via Londres. La politique devrait simplement se détacher du lobbying historique et notoire de la place financière.

Cas particulier des exportations pharmaceutiques: Roche et Novartis

Voilà pour l’or, passons maintenant à l’industrie pharmaceutique: au vu des déclarations de M. Trump, il faut supposer que les groupes pharmaceutiques suisses jouent un rôle particulier et seront pris pour cible. Les exportations pharmaceutiques suisses vers les Etats-Unis représentent environ la moitié des exportations ordinaires de marchandises vers ce pays (hors or). Certains indices laissent penser que les grandes entreprises pharmaceutiques suisses ont été particulièrement prises en compte comme moyen de pression dans la fixation des «droits de douane punitifs» élevés pour la Suisse.

Les Américains visent en particulier Novartis et Roche en raison des prix élevés de leurs médicaments et de leurs ventes. Selon une étude de la Rand Corporation, les prix des médicaments aux Etats-Unis sont en moyenne 2,8 fois plus élevés que la moyenne des 33 pays comparables de l’OCDE. Les médicaments de marque (préparations originales) sont même 4,2 fois plus chers. Le quotidien «Neue Zürcher Zeitung» estime que les prix des médicaments américains des exportateurs suisses sont environ deux à trois fois plus élevés qu’en Suisse. Ces prix élevés sont en partie dus à la complexité du système de distribution libéralisé aux Etats-Unis, qui fait appel à des intermédiaires tirant également profit de la situation. Roche et Novartis ont également réalisé jusqu’à présent d’énormes profits sur le marché américain et versé des redevances élevées dans la «licence box» bâloise (caisse séparée controversée permettant de bénéficier de taux d’imposition plus bas sur les redevances).

Après la menace de Trump d’augmenter de 250% les droits de douane sur toutes les importations de médicaments, Roche et Novartis se sont empressés de confirmer qu’ils allaient investir des dizaines de milliards de dollars pour développer leur production pharmaceutique aux Etats-Unis. Jusqu’à présent, Trump avait exempté les importations pharmaceutiques des «droits de douane punitifs», car celles-ci représentent une part importante de l’indice des prix à la consommation et entraîneraient une hausse visible des prix à la consommation aux Etats-Unis.

Comme le rapporte le «Neue Zürcher Zeitung», l’association pharmaceutique suisse Interpharma exige désormais une «compensation» sous la forme d’une augmentation des prix des médicaments en Suisse. Et ce, malgré le fait que les prix suisses des médicaments originaux sont les plus élevés d’Europe et restent en moyenne 9% supérieurs aux prix de référence des neuf pays européens comparables. Jusqu’à présent, l’OFSP, sous la direction de la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider, a refusé une augmentation compensatoire des prix des médicaments en Suisse (en réponse à la pression sur les prix aux Etats-Unis). La pression exercée par les grandes entreprises pharmaceutiques devrait se poursuivre au Parlement.

Important à savoir: l’agenda stratégique de Trump

Des journalistes perplexes et des politiciens irrités qualifient les «droits de douane punitifs» de Trump de confusion populiste ou de chaos dans l’esprit du président américain. C'est trop simpliste, illusoire et trompeur.

Trump et ses inspirateurs de la «Heritage Foundation» ont un programme clair et ciblé. Avec le slogan populiste «Make America Great Again» du mouvement MAGA qui en résulte, Trump veut corriger le déficit commercial notoirement élevé et croissant, qui avait dépassé 1200 milliards de dollars en 2024. Cela signifie que les Etats-Unis importaient chaque jour plus de 3 milliards de dollars de marchandises de plus qu’ils n’en exportaient. Rien qu’avec la Chine, le déficit commercial s’élevait chaque jour à près d’un milliard de dollars. L’excédent souvent cité de la balance des services des Etats-Unis (grâce aux exportations des groupes technologiques, au commerce de logiciels et aux revenus publicitaires en ligne) n’en représente qu’une fraction. Par rapport à la Suisse, l’excédent américain des exportations de services était toutefois relativement élevé, avec 30 milliards de dollars (à titre de comparaison: 38 milliards de dollars de déficit commercial «non aurifère» des Etats-Unis avec la Suisse en 2024).

Augmentation de la dette extérieure des Etats-Unis. Avoirs étrangers
nets des Etats-Unis, en milliards de dollars.

Les Etats-Unis importent depuis longtemps du monde entier à crédit, selon la devise «achetez aujourd’hui, payez plus tard». Ces importations sont financées par des crédits et des placements en dollars provenant de l’étranger, principalement par des Treasury Bills (obligations d’Etat en dollars) et des achats d’actions. La dette extérieure croissante menace depuis des années d’affaiblir les Etats-Unis. Au grand dam de Wall Street, le dollar s’est à nouveau déprécié et les agences de notation ont abaissé la note de crédit de la dette publique (US Treasury Bills). Le programme stratégique de Trump consiste à freiner les importations par des droits de douane élevés et à rapatrier la production étrangère aux Etats-Unis. Cela permettrait de limiter la dette extérieure et de financer davantage les caisses de l’Etat.

La stratégie économique vulgaire de Trump peut être compréhensible pour certains segments de la population américaine: il suffit d’augmenter les droits de douane et de protéger les emplois locaux! A titre de comparaison: lorsque, dans les années 1990, les aciéries suisses de Klus, Gerlafingen, Choindez et Rondez sont devenues déficitaires les unes après les autres en raison des importations de fer bon marché et ont dû fermer progressivement, de nombreux responsables et employés de l’USMT ont demandé: «Pourquoi notre Conseil fédéral n’augmente-t-il pas simplement les droits de douane sur les importations de fer et d’acier en provenance de Lorraine et de Russie? Pourquoi le Conseil fédéral ne nous protège-t-il pas?»

Déclin de l'industrie américaine. Part de l'emploi dans le secteur
industriel, en pourcentage.

La stratégie de cloisonnement par des «droits de douane punitifs » est toutefois un signe indéniable du déclin économique des Etats-Unis. L’industrie américaine n’est plus compétitive. Qui achète encore des voitures ou des appareils électroménagers américains dont la durée de vie est de deux ou trois ans?

L’experte suisse-américaine Claudia Franziska Brühwiler de l’Université de Saint-Gall explique la boussole économique de Trump: «Beaucoup de conseillers de Trump et de membres de son administration adhèrent à la pensée dite du nouveau conservatisme. L’efficacité économique, la consommation et la croissance économique ne sont pas leurs priorités. […] Au centre de leurs préoccupations se trouve le citoyen travailleur qui doit pouvoir offrir une bonne vie à sa famille, et non le consommateur.» (Neue Zürcher Zeitung, 18 août 2025)

La politique de l’OMC et le dogme du libre-échange ont détruit le commerce

Le système mondial de libre-échange de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) et, à partir de 1995, de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), qui a été initié et imposé par le gouvernement américain Clinton – notamment l’adhésion de la Chine à l’OMC en 2001 – ont conduit au déclin industriel des Etats-Unis. Les droits de douane industriels ont été progressivement réduits par le GATT et appliqués à l’échelle mondiale selon le principe de la nation la plus favorisée. Avec l’OMC, des sanctions coercitives ont été ajoutées.

Avec l’hyperglobalisation néolibérale croissante (qu’ils avaient eux-mêmes inspirée et imposée), les Etats-Unis ont acheté de plus en plus et à moindre coût au Japon, en Corée du Sud, puis en Chine. En l’espace de deux décennies, les industries sidérurgique, mécanique et automobile américaines ont été littéralement détruites par des importations moins chères. Des millions d’employés qualifiés dans l’industrie et la production automobile ont été rapidement poussés vers la précarité et ont subi un déclin social sans précédent. Cette mutation structurelle industrielle s’est déroulée sans protection sociale, avec des allocations chômage de courte durée, sans aides à la reconversion et sans politique structurelle.

L’industrie américaine (à l’exception de l’industrie de l’armement protégée) a été littéralement détruite par les importations asiatiques. Les Etats industriels autrefois les plus riches, tels que la Pennsylvanie, l’Ohio, l’Indiana, le Michigan et le Wisconsin, sont devenus la «Rust Belt» (ceinture de rouille) et finalement des Etats pivots en faveur de Trump.

L’influence de la doctrine du libre-échange de l’OMC dans cette destruction industrielle mériterait un chapitre à part entière. L’OMC était aveugle sur le plan social et écologique. Dans les conflits commerciaux, elle a toujours donné la priorité au libre-échange plutôt qu’aux conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) en matière de protection des travailleurs (par exemple, interdiction du travail des enfants, interdiction de la discrimination) et à tous les accords écologiques (par exemple, protection des bois tropicaux, protection des dauphins). Les pays récalcitrants ont été sanctionnés par des panels disciplinaires et des sanctions. Ce «régime de libre-échange fondé sur des règles» de l’OMC est aujourd’hui en ruine. L’hyperglobalisation néolibérale a démantelé ses inventeurs!

La destruction des règles de l’OMC par Trump et son agenda de politique étrangère constituent une tentative (probablement vouée à l’échec) de reconstruire l’industrie aux Etats-Unis, de remplacer les importations par la production nationale et d’équilibrer la balance des paiements. Le plan géopolitique visant à démanteler les 750 bases militaires américaines présentes aujourd’hui dans 80 pays – ou à les faire payer par d’autres pays – s’inscrit également dans cette stratégie néoconservatrice nationale.

Ces mesures visant à empêcher le déficit de la balance commerciale ne sont probablement pas totalement inefficaces. Mais les «dommages collatéraux» de la politique douanière de Trump la mèneront à l’échec: effets inflationnistes au niveau national, pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans le cadre de la réindustrialisation, commerce de contournement, récession économique.

Comment réagir? Stratégies pour la politique douanière de la Suisse

1. Au lieu de se livrer à des accusations inutiles et de se réfugier derrière des programmes politiques bien connus, la Confédération doit tout mettre en œuvre à court terme et immédiatement pour retirer les exportations d’or de la balance commerciale. Les exportations d’or monétaire appartiennent de facto au compte des transactions en capital. Car à l’avenir aussi, il y aura à nouveau des turbulences monétaires et une explosion soudaine des exportations d’or pour protéger les actifs des banques, des oligarques et des super-riches. La classification statistique des exportations d’or peut certainement être assouplie, comme décrit ci-dessus.

2. Les exigences tactiques de «fermeté» à l’égard de l’administration Trump, de droits de douane compensatoires ou de subventions à l’exportation compensatoires, de menaces de boycott et d’exonérations fiscales sont naïves, voire contre-productives. La politique mondiale, marquée par la descente et l'ascension des puissances hégémoniques, ne peut être abordée avec des considérations morales et des sanctions réciproques de la part de petits Etats.

3. Les surtaxes douanières de 39% sur les exportations suisses sont une nuisance, mais elles ne sont pas fixées pour l’éternité et pourraient bientôt être renégociées grâce à une balance commerciale actualisée (baisse des exportations d’or, excédents commerciaux réduits). C’est pourquoi la stratégie du Conseil fédéral, qui consiste à renégocier avec des offres adaptées, des statistiques actualisées et surtout des négociateurs expérimentés, n’est pas inutile et certainement pas contre-productive.

4. Pour de nombreuses entreprises exportatrices, il est d’abord nécessaire de procéder à une réorientation géographique ou technologique plus ou moins douloureuse. Sur le plan de la politique intérieure, l’extension immédiate de l’indemnisation du chômage partiel à 24 mois est une priorité afin de faciliter l’adaptation industrielle. La plupart des entreprises concernées réagissent d’ailleurs de manière plus réaliste et plus sereine que les responsables des associations et leurs porte-parole!

5. Le problème des exportations pharmaceutiques, des prix des médicaments et de la délocalisation de la production industrielle vers les Etats-Unis n’est pas encore résolu et, à l’heure actuelle, les sanctions éventuelles sont encore inconnues. L’économie suisse est «prisonnière de l’industrie pharmaceutique» (selon Georges Kern, PDG de Breitling). Christoph Mäder, président d’Economiesuisse, s’est jusqu’à présent épuisé à se lamenter et à adresser des demandes absurdes à la Berne fédérale pour la suppression de l’impôt minimum de l’OCDE, selon le modèle de Trump. Interpharma, quant à elle, réclame en Suisse des augmentations compensatoires des prix des médicaments sur le marché intérieur. Chez Economiesuisse, les grands groupes pharmaceutiques sont les membres les plus influents et ceux qui versent les cotisations les plus élevées. Economiesuisse doit d’abord mettre de l’ordre dans ses propres affaires et obliger les groupes pharmaceutiques à prendre leurs responsabilités. A Berne, on prétend que le président du conseil d’administration de Roche, Severin Schwan, a accompagné la délégation officielle suisse aux négociations afin de défendre les privilèges des grandes entreprises pharmaceutiques. Le problème pharmaceutique n’est pas avant tout un problème fédéral, mais d’abord un problème de gestion interne à Economiesuisse!

6. Nous vivons dans une nouvelle ère de politique de puissance. C’est le pouvoir qui prime, et non le droit. Nous assistons à la formation d’une structure de pouvoir tripolaire avec les Etats-Unis, la Chine et la Russie, trois zones d’influence hégémoniques et de plus en plus autoritaires. Entre elles se trouve une Union européenne de plus en plus faible sur le plan commercial et économique. L’âge d’or de la paix relative et de l’hyper-globalisation entre 1990 et 2020, avec un ordre fondé sur des règles, est révolu. Cela nécessite de nouvelles stratégies nationales de la part de la Suisse, par exemple la poursuite du développement d’accords bilatéraux de libre-échange avec les grands marchés en croissance du Sud. Même quand M. Trump ne sera plus, l'ancien ordre mondial ne sera pas rétabli.

* Rudolf Strahm a été conseiller national PS et surveillant fédéral des prix. Il a été secrétaire central du PS pendant sept ans, président de l’association bernoise des locataires pendant quatre ans et président de l’Association suisse des locataires (Suisse alémanique) pendant 13 ans.

Source: https://direkt-magazin.ch/meinung/kkrft-fr/rudolf-strahm-wir-leben-im-neuen-zeitalter-von-machtpolitik/, 28 août 2025. Republié avec l'aimable autorisation de l'auteur.

(Traduction «Point de vue Suisse»)

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