La magie du drapeau blanc suscite l'espoir

Sauvegarder la neutralité suisse

par Ursula Felber*

(31 octobre 2025) Max Dätwyler a parcouru le monde avec un drapeau blanc pour la paix – moqué, méconnu, mais inébranlable. Son courage nous rappelle que se taire en temps de guerre, c'est se rendre complice.

ISBN: 978-3-907625-33-0

La paix nous concerne tous et chacun peut semer les graines de la paix. Rares sont ceux qui approuvent la violence, mais quiconque s'engage pour la paix en temps de guerre a du mal à se faire entendre. On est vite soupçonné d'être naïf ou de se tromper de camp.

Au vu de la situation mondiale actuelle, il convient de se souvenir du Suisse Max Dätwyler (1886–1976). Toute sa vie, il a tenté d'inciter les puissants de ce monde à faire la paix. Avec un engagement sans faille, beaucoup d'humour, des idées originales et une grande persévérance, il s'est investi pour la paix dans le monde. Vêtu de son long manteau noir, coiffé de son chapeau, sa serviette sous le bras et son drapeau blanc à la main, il a marché de ville en ville, de pays en pays. Dans les années 1950 et 1960, tous les enfants le connaissaient.

On le surnommait plutôt avec dédain «l'apôtre de la paix». Dätwyler s'est rendu à Berlin-Est et Berlin-Ouest, s'est tenu sur la Place Rouge à Moscou, a manifesté à Paris contre la guerre d'Algérie, a voulu rencontrer John F. Kennedy au Capitole à Washington, a fait campagne pour une Cuba neutre, s'est rendu à Londres, au Caire et à Jérusalem. Il n'a été reçu nulle part. Cela ne l'a toutefois pas empêché de militer sans relâche pour la paix dans le monde. Porté par cette conviction, il a toujours trouvé le moyen d'attirer l'attention des gens.

Lors de la mobilisation en 1914, Max Dätwyler a refusé de prêter serment au drapeau en signe de protestation contre la guerre. Il a alors été interné en hôpital psychiatrique et exclu de l'armée. Après sa libération en 1915, il a fondé à Berne l'Association Friedensarmee [Armée de la paix], une armée dédiée à l'éducation populaire.

Max Deatwyler en 1964 sur la Place Rouge à Moscou. (Photo tirée
du livre)

En 1932, il est parti à pied de Zurich pour rejoindre Genève. Il voulait participer à la conférence sur le désarmement de la Société des Nations, cependant, il n'a pas été admis. A partir de la Seconde Guerre mondiale, le drapeau blanc fut son compagnon permanent. En 1962, il a fondé une nouvelle Convention de Genève et appela au désarmement nucléaire. Max Dätwyler s’est rendu dans les centres de pouvoir et les foyers de crise du monde entier et a milité pour la paix mondiale et le désarmement. Ainsi, en tant qu'apôtre de la paix avec son drapeau blanc, il est devenu une figure symbolique du pacifisme mondialement connue.

La plupart de ses contemporains le considéraient comme un excentrique et un original déconnecté du monde réel. Il fut ostracisé, interné en hôpital psychiatrique, arrêté. A plusieurs reprises, les autorités ont voulu le mettre sous tutelle. Mais grâce à son refus et à un avis favorable de sa commune d'origine de Zumikon ZH, cela ne s'est jamais produit.

Max Dätwyler était un chrétien et un Suisse convaincu. Il voulait promouvoir le modèle étatique suisse dans le monde entier comme base d'une coexistence pacifique. La Suisse, le pays du fondateur de la Croix-Rouge, le pays avec la plus ancienne neutralité.

L'Europe se réarme et le monde ne se porte pas mieux. Les droits de l'homme, le droit international humanitaire, l'interdiction onusienne du recours à la force ne sont pas respectés. Tous les acquis, plaçant le droit au-dessus de la force, sont actuellement bafoués.

Aujourd'hui, la Suisse se trouve à la croisée des chemins et doit choisir entre la neutralité et l'OTAN; les deux ne sont pas compatibles. L'«Initiative sur la neutralité»1 crée les conditions nécessaires pour être indépendant et gagner la confiance du monde.Même si l'influence directe sur les puissants est limitée, chaque particulier peut sensibiliser à l'horreur de la guerre, s'engager en faveur du dialogue et ainsi donner matière à réflexion. On a ri au nez de Max Dätwyler. Avec son courage et sa droiture, il est pour nous un modèle. Et la question demeure: si personne ne brandissait plus le drapeau blanc, ne serions-nous, ne serait le monde pas plus pauvre?

1 https://neutralitaet-ja.ch/fr/aktuelles/

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