Comment la Finlande et la Suède sont-elles entrées dans l’OTAN?

Jan Oberg. (Photo transnational.live)

Adhérer, c’est faire un gros cadeau au militarisme et aux guerres futures

par Jan Oberg,* Suède

(20 juin 2022) (Réd.) Jan Oberg, chercheur sur la paix, internationalement reconnu, décrit le contexte politico-historique de l’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN. Comment en est-on arrivé à ce que ces deux pays abandonnent en quelques semaines seulement leur neutralité ou leur non-alignement couronné de succès?

Cette analyse est également pertinente pour la Suisse lorsqu’il s’agit de forcer l’adhésion du pays à l’OTAN et à l’UE et qui feraient ainsi du petit Etat qu’est la Suisse le jouet des grandes puissances.

* * *

Voici ce que l’Occident est intellectuellement incapable de voir, au milieu de son humeur militariste et moralisatrice sans bornes:

La politique d’expansion de l’OTAN a créé – et est responsable – du conflit. La Russie a créé – et est responsable – de la guerre. Il n’existe aucune violence qui ne soit pas enracinée dans des conflits sous-jacents. Les personnes qui connaissent les conflits et la paix parlent donc des deux.

(Infographie Jay Coop/wikimedia.org)

Résoudre les conflits au lieu de «punir»

Et s’ils veulent la paix, ils n’aggravent pas les symptômes – la guerre – ils s’attaquent à la véritable cause, le conflit, et demandent aux parties en conflit de dire ce qu’elles craignent et ce qu’elles veulent, pour ensuite avancer, étape par étape, vers une solution durable.

Cependant, ni les grands médias ni les politiciens n’ont le courage civique d’aborder le conflit. Il ne s’agit que de la guerre et uniquement de la Russie de Poutine qui doit être punie, quel que soit le prix à payer par les générations futures. A condition de survivre.

C’est une banalité de rappeler qu’il faut être au moins deux pour entrer en conflit. Mais c’est le niveau intellectuel et moral auquel opèrent les dirigeants, les médias et une grande partie du milieu universitaire en ces temps sombres.

Cette approche n’a pas d’avenir et ne pourra jamais apporter la paix. Point final.

Des décisions prises dans une panique hystérique

Les décisions prises avec cette approche irrationnelle et cette sensibilité ne feront qu’empirer les choses. Comme l’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN, basée sur la panique hystérique du moment: il n’existe tout simplement aucun scénario crédible et réaliste qui conduirait à une attaque russe isolée, soudaine et inattendue, contre l’une ou l’autre de ces deux nations si elles restaient non alignées comme elles le sont depuis des décennies.

Le fait que des personnes moins bien informées ou des personnes s’expriment en faveur de l’adhésion à l’OTAN aient parlé d’une attaque isolée, soudaine, contre l’île suédoise de Gotland relève de la politique des Monty Python.

Pourquoi la Suède et la Finlande vont-elles adhérer?

Alors, pourquoi la Finlande et la Suède vont-elles maintenant prendre la décision désastreuse, accroissant la tension, d’adhérer à l’OTAN? Voici quelques-unes des raisons possibles:

  • Les deux pays ont subi de fortes pressions de la part de l’OTAN et des Etats-Unis en particulier. Le Premier ministre suédois, Olof Palme, a été assassiné. C’était un homme qui défendait l’objectif des Nations Unies en matière de désarmement international, d’abolition nucléaire et le concept pertinent de sécurité commune. Des ambassadeurs américains ont tenu des réunions secrètes avec des députés suédois, il y a de nombreux canaux, des demandes et des récompenses.
  • Le pire défi de la Suède en matière de sécurité a été le sous-marin russe U 137 Whisky on the Rocks. Il était russe, certes, mais l’opération était une PsyOps (opération psychologique) américaine menée par l’«expert en navigation» à bord, le seul à n’avoir jamais été interrogé en Suède et qui a disparu peu après.

Il s’agissait d’une PsyOps destinée à faire reconnaître à la Suède que l’Union soviétique était une menace, que sa défense contre l’Est était insuffisante et qu’elle devait elle-même chercher la protection de l’Occident.

Ceci est extrêmement bien documenté par l’éminent professeur émérite Ola Tunander qui a mené des recherches sur plusieurs décennies, finalement publiées dans le livre «Navigationsexperten. Hur Sverige lät sig bedras av U 137» [L’expert en navigation. Comment la Suède a accepté d’être bernée par l’U 137].1

Pas à pas, la Suède a été guidée dans la bonne direction. Certains politiciens suédois savaient ce qui se passait à l’inverse des médias et du peuple.

Un lent rapprochement avec l’OTAN – pourquoi ne pas se marier de suite?

  • Les deux pays ont accepté d’être courtisés par les Etats-Unis et l’OTAN. Au cours des vingt dernières années, ils se sont engagés auprès de l’OTAN de différente manière, alors, comme le dit le dicton, pourquoi ne pas se marier sur-le-champ? En d’autres termes, la Finlande et la Suède adhèrent aujourd’hui à l’OTAN parce qu’elles ont progressivement pris chacune leur tour une mauvaise décision, qu’elles se sont enfermées dans un coin où il n’y a pas d’autre choix que l’OTAN et qu’elles ont renoncé à toute réflexion créative sur la politique étrangère, indépendante et historique. Et elles ont cessé de critiquer la guerre et le militarisme.

    Cela a également été possible parce que l’apport intellectuel indépendant, critique ou alternatif a été supprimé et remplacé dans les ministères des Affaires étrangères par divers types de marketing pro-américain des politiques. Pendant des décennies, la chambre d’écho de l’OTAN a défini la pensée de groupe nationale pro-OTAN. Personne n’a été autorisé à poser la question suivante: où diable serons-nous dans, disons, 25 ans?
  • De plus, si la Suède et la Finlande adhèrent aujourd’hui à l’OTAN, c’est parce que les élites liées au Complexe militaro-industriel, médiatique et académique (MIMAC) de ces deux pays décident, plutôt que le peuple, des questions de sécurité et de politique étrangère. Bien entendu, il y a eu très peu de discussions publiques ouvertes. Elles n’étaient pas souhaitées. Les dirigeants savaient que le fondement des armes nucléaires de l’OTAN et les guerres de contact de ses membres, notamment au Moyen-Orient, étaient considérés comme fondamentalement mauvais par les citoyens.

Pas de référendum parce que le temps presse?

  • Les médias libéraux suggèrent qu’il ne peut y avoir de référendum parce que le temps presse, probablement avant qu’il n’y ait une invasion de la Suède et de la Finlande par la Russie, et qu’il faut donc prendre à la hâte la décision la plus importante en matière de politique étrangère et de sécurité depuis 1945, maintenant que la population est indignée par la Russie, l’ennemi inévitable et bien-aimé.

Les décideurs suédois savent bien sûr qu’il n’y aura jamais une majorité d’environ 75% pour l’OTAN, ce qui devrait être le cas pour prendre une décision aussi fondamentale et fatidique. Voilà pour la démocratie, me direz-vous, mais aucun nouveau membre de l’OTAN n’a organisé un référendum où l’OTAN et d’autres alternatives ont été librement discutées et où une majorité de 75% s’est dégagée. (Selon le quotidien suédois Svenska Dagbladet du 6 mai 2022, 48% des personnes interrogées pensent que la Suède doit adhérer à l’OTAN, mais en une semaine seulement, les indécis sont passés de 22 à 27%).

L’opinion pro-OTAN de la Finlande semble être passée de 53% en février à 76% en mai 2022. Elle était de 19% en 2017 selon un rapport du Wall Street Journal.2 L’Ukraine a joué son rôle.

Erosion intellectuelle

  • Une raison supplémentaire d’adhérer est le désarmement intellectuel: les dirigeants se sont mis d’accord sur une alternative, ils ont oublié de laisser d’autres portes ouvertes et ont délibérément étouffé les autres alternatives. Le discours sur la paix dans les médias, la politique et la recherche a disparu. La paix est devenue synonyme d’armes, de dissuasion, de plus en plus couplée à une loyauté aveugle à chaque guerre USA/OTAN.

Par exemple, le gouvernement du Premier ministre social-démocrate de l’époque, Göran Persson, a rapidement décidé de désactiver la législation suédoise sur l’interdiction des exportations d’armes en 2001 afin de pouvoir continuer à exporter des armes aux Etats-Unis lors de leur invasion en Irak.

Ce désarmement intellectuel de plusieurs années est manifeste et tend toujours à privilégier les moyens militaires par rapport aux moyens civils et à la diplomatie. Et pas seulement dans ces pays, bien sûr.

Un institut tel que le SIPRI – Stockholm International Peace Research Institute – s’est décomposé subtilement en quelque chose qui devrait plutôt s’appeler Stockholm International Military Security Research, SIMSI – comme je l’avais suggéré, il y a plusieurs années.3

En d’autres termes, la créativité politique qui était nécessaire pour mener une politique indépendante et neutre, de non-alignement et de désarmement mondial, associée à une forte croyance dans le droit international, a disparu il y a belle lurette.

Il est plus facile de suivre le troupeau surtout quand, comme il parait, le parti social-démocrate n’existe aujourd’hui que par son nom.

  • Sans épuiser toutes ces raisons tragiques, la dernière à mentionner est le rôle des médias. Comme partout ailleurs, les médias qu’ils soient de gauche ou de droite se sont unifiés autour d’une politique pro-occidentale et non neutre. La propagande pro-OTAN actuelle, notamment dans le libéral Dagens Nyheter, est omniprésente. Les voix critiques sont marginalisées et les «explications» concernant l’information publique sont réduites à des faits de base simplifiés associés à des FOSI = Fake + Omission + Source Ignorance [Falsification + omission + ignorance des sources]. La Suède est capable d’organiser des débats télévisés où, de facto, tous les participants sont plus ou moins pro-OTAN, ce qui laisse de côté une grande partie de l’opinion publique. (Soyez assurés qu’une analyse comme celle-ci ne provoquera aucune réaction dans les médias d’aucun pays de l’OTAN ou parmi les décideurs, bien qu’elle soit envoyée à des milliers d’entre eux. JO)

Quelles seront les conséquences de l’adhésion de la Finlande et de la Suède à l’OTAN?

Elles sont potentiellement si nombreuses, certaines plus probables que d’autres, qu’il est impossible de les énumérer toutes dans une brève analyse pointue comme celle-ci. Mais permettez-moi de les mentionner:

  • Les Suédois et les Finlandais seront moins en sécurité. Pourquoi? Parce qu’il y aura une confrontation et une polarisation plus rigides au lieu de frontières souples et d’attitudes médiatrices. En cas de crise grave, elles seront occupées par les Etats-Unis et l’OTAN qui leur diront quoi faire.
  • Dans la mesure où, à un moment donné à l’avenir, les deux pays seront invités à accueillir des bases américaines, comme le font la Norvège et le Danemark actuellement, ils ne pourront pas dire «non!» Ces bases seront les premières cibles de la Russie en cas de guerre.
  • Du point de vue de la Russie, bien sûr, leur adhésion à l’OTAN est extrêmement génératrice de tensions et de confrontations. La Russie représente 8% (66 milliards de dollars) des dépenses militaires des 30 membres de l’OTAN. Il y aura maintenant un réarmement massif dans l’ensemble de l’OTAN. A elle seule, l’Allemagne prévoit de porter ses dépenses à près du double de celles de la Russie. L’Ukraine recevra environ 50 milliards de dollars. Ajoutez à cela une Suède et une Finlande réarmées et nous verrons la Russie tomber à 4% des dépenses de l’OTAN, tout en continuant à être considérée comme une menace redoutable.
  • Il n’y aura pratiquement plus de mécanismes d’instauration de la confiance et de résolution des conflits en Europe. Aucune discussion ne sera possible sur un nouveau système de paix et de sécurité paneuropéen. Et qu’elle soit comprise et respectée ou non, la Russie se sentira encore plus intimidée, isolée et, au bout du compte, deviendra encore plus désespérée. Comme l’est, normalement, l’élément le plus faible dans un conflit asymétrique. Nous vivons une époque très dangereuse et l’adhésion de ces deux pays à l’OTAN ne fera qu’accroître le danger, elle ne pourra en aucun cas le réduire.

Des soldats suédois et finlandais pour les guerres de l’OTAN?

  • Si la Finlande et la Suède veulent tellement être «protégées» par les Etats-Unis et/ou l’OTAN, il est totalement inutile que ces deux pays adhèrent, car, en cas de crise grave, les Etats-Unis/OTAN viendront en toutes circonstances «protéger» ou plutôt utiliser leurs territoires pour se rapprocher des républiques baltes. C’est l’objet des accords de soutien du pays hôte.

La seule raison d’adhérer serait le paragraphe 5. Mais l’inconvénient est que celui-ci exige que la Finlande et la Suède participent à des guerres qui ne concernent pas leur défense et peut-être même à de futures guerres qui violent le droit international comme celles de Yougoslavie, d’Irak et de Libye. Ainsi, les jeunes Finlandais et Suédois seront-ils tués dans les futures guerres des pays de l’OTAN? Sont-ils prêts pour cela?

  • La conversion de leur infrastructure militaire en vue d’une adhésion totale à l’OTAN coûtera une fortune, et une fois qu’ils auront adhéré, ils ne pourront pas ne pas payer le prix qui s’avérera être le leur. De plus, il y aura beaucoup moins de décisions souveraines de facto possibles. Ici, le de jure est presque sans importance. Et cela était déjà très autolimité avant leur adhésion.

Des armes nucléaires en Suède et en Finlande?

  • En tant que membres de l’OTAN, la Finlande et la Suède ne peuvent que partager la responsabilité des armes nucléaires, la dissuasion et l’utilisation éventuelle de celles-ci par l’OTAN. Il est également évident que les navires de l’OTAN peuvent fournir des armes nucléaires dans leurs ports, mais ils ne poseront bien sûr même pas la question. Ils connaissent la réponse dédaigneuse des Etats-Unis: «Nous ne confirmons ni ne nions de telles choses».

Cela va à l’encontre de l’âme du peuple suédois et de la décision de la Suède, qui date de plus de 70 ans, de ne pas développer d’armes nucléaires.

  • Le nombre de jours où la Suède et la Finlande peuvent encore travailler à des alternatives sont comptés. En d’autres termes, travailler sur le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN) et les objectifs de l’ONU en matière de désarmement général ainsi que sur tout concept politique alternatif comme la sécurité commune, la sécurité humaine, une ONU forte, etc. Ils ne seront pas en mesure de servir de médiateurs comme, par exemple, l’Autriche et la Suisse. Aucun membre de l’OTAN ne peut soutenir une adhésion même de pure forme à des objectifs aussi nobles. L’OTAN n’est pas une organisation qui encourage les alternatives. Au contraire, elle recherche le monopole ainsi que la domination régionale et mondiale.

Les Etats-Unis sont en guerre 225 années sur 243 depuis 1776

  • La Finlande et la Suède disent oui à la pensée militariste, à un paradigme de «paix» qui est imprégné d’armes, d’armement, d’offensivité (longue portée + grande capacité de destruction), de dissuasion et de menace constante: L’OTAN est l’organisation la plus militariste de l’histoire de l’humanité. Son chef de file, les Etats-Unis d’Amérique, a été en guerre 225 années sur 243 depuis 1776.4 Toute idée de non-violence, la disposition de la Charte des Nations Unies prévoyant de faire la paix par des moyens essentiellement pacifiques (article 1 de la Charte), sera mise de côté.
  • L’attention politique, ainsi que les fonds, auront tendance à se porter sur les questions militaires, au lieu de contribuer à la résolution des problèmes les plus urgents de l’humanité. Mais, nous le savons déjà, l’excuse sera l’invasion de l’Ukraine par Poutine. Existe-t-il un énorme changement qui ne puisse être justifié par cette référence?
  • Alors que tout le monde sait que l’Arctique sera une région au centre des préoccupations en matière de sécurité et de paix dans un avenir proche, cette question est à peine abordée en relation avec l’adhésion des deux pays à l’OTAN. Pourtant, il n’est pas nécessaire d’être un expert pour comprendre que l’accès des Etats-Unis et de l’OTAN à la Suède et à la Finlande constitue un avantage évident dans la future confrontation avec la Russie et la Chine dans cette région.
  • En tant que membres de l’OTAN, la Suède et la Finlande non seulement acceptent, mais renforcent des décennies de haine envers le peuple russe, de tout ce qui est russe, y compris la culture russo-européenne. Elles diront oui à la punition collective (illégale), irresponsable et irréfléchie de l’Occident à l’égard de tout ce qui concerne la Russie, la résiliation de la Russie dans toutes ses dimensions.

Manque de conscience de ce que signifie la guerre

  • Il fut un temps où, à l’inverse, le président finlandais Kekkonen défendait des politiques de neutralité active, un rôle d’intermédiaire et le lancement de l’OSCE. La Finlande était fière que son peuple ait le sentiment que ni l’Est ni l’Ouest n’étaient des ennemis, diverses sortes d’équidistances prévalant. Et ce, au plus fort de la première guerre froide, lorsque le Pacte de Varsovie face à l’OTAN était environ dix fois plus fort que la Russie actuelle. Comment et pourquoi? L’une des raisons était que les politiques avaient un fondement intellectuel et les dirigeants une conscience de ce que signifiait la guerre. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
  • La perspective dont aucun défenseur de l’OTAN ne parle est la suivante: selon toute vraisemblance, nous n’avons vu que le dur début d’une guerre extrêmement froide, avec un risque toujours plus grand de guerre chaude. L’objectif déclaré des Etats-Unis – et donc de l’OTAN – est d’affaiblir militairement la Russie en Ukraine afin qu’elle ne puisse plus jamais se soulever, et de miner son économie au moyen des sanctions les plus dures, illimitées dans le temps et inconditionnelles de l’histoire, c’est-à-dire des sanctions qui ne seront pas levées avant une vie ou plus.

Intégré dans la lutte des Etats-Unis contre la Chine

  • • Enfin, en adhérant à l’OTAN, les deux pays seront contraints de se ranger du côté de l’Occident dans le futur changement d’ordre mondial où la Chine, le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Amérique latine, ainsi que d’énormes associations régionales non occidentales, gagneront en puissance. La priorité numéro un des Etats-Unis est la Chine. En tant que membres de l’OTAN, la Suède et la Finlande seront incapables à l‘avenir de marcher sur deux jambes, une occidentale et une non occidentale, et déclineront et tomberont avec l’Occident, l’empire américain et l’OTAN en particulier.

Si vous pensez qu’il s’agit d’un scénario trop audacieux et pessimiste, c’est que vous ne suivez pas les développements et les tendances en dehors de l’Occident lui-même. De plus, considérez que les Etats-Unis, l’UE et l’OTAN, divisés et déchirés par les problèmes, se sont réunis pour une seule raison: la politique négative consistant à haïr la Russie et à dissimuler leur coresponsabilité évidente dans le conflit qui nous a menés là où nous sommes.

L’Occident n’a plus de vision positive, ses actions se résument au réarmement, aux menaces, aux sanctions, à la diabolisation, au discours moralisateur «nous n’avons jamais rien fait de mal» et à la projection concomitante de ses propres côtés sombres sur les autres, la Chine en particulier.

Quand de petits pays mettent tous leurs œufs dans le même panier, alors qu’ils disposent d’alternatives, et agissent sans la moindre idée des cinq à dix prochaines années, c’est une porte ouverte au désastre et à la guerre.

L’OTAN et l’UE agissent aujourd’hui comme les passagers du restaurant de l’élégant et luxueux RMS Titanic.

Il y avait d’énormes problèmes qui auraient dû être résolus pour que l’humanité survive: le climat, l’environnement, la pauvreté, les inégalités, le militarisme, les armes nucléaires, etc. Ils sont aujourd’hui oubliés. La crise économique et les perturbations ont suivi, puis la covid est arrivée et a prélevé un lourd tribut sur toutes sortes de ressources et d’énergies. Et, finalement, cette guerre en Europe avec son conflit sous-jacent créé par l’OTAN.

Manque de force intellectuelle

Ce n’est pas le moment de prendre des décisions dans une situation d’hystérie et de panique historique. C’est au contraire le moment de garder son sang-froid.

On ne peut que regretter que la Suède et la Finlande n’aient pas le pouvoir intellectuel de voir une image plus large dans le temps et l’espace. L’OTAN a eu le temps, depuis 1949, de prouver qu’elle pouvait faire la paix. Nous savons maintenant qu’elle ne le peut pas. Y adhérer, c’est donc faire un gros cadeau au militarisme et aux guerres futures.

* Jan Oberg, né en 1951, est un citoyen danois vivant à Lund, en Suède, depuis 1971. Il est un chercheur, médiateur et commentateur de la paix internationalement respecté, ainsi que photographe d’art. Jan Oberg et son épouse, le Dr Christina Spännar, sont les fondateurs de la Fondation transnationale pour la paix par des moyens pacifiques (TFF).

Source: https://transnational.live/2022/05/12/it-is-foolish-for-finland-and-sweden-to-join-nato-and-ignore-both-the-real-causes-and-consequences/, 12 mai 2022

(Traduction «Point de vue Suisse»)

1 https://www.karnevalforlag.se/bocker/navigationsexperten/

2 https://www.wsj.com/articles/finlands-drift-toward-nato-membership-accelerated-by-russias-ukraine-invasion-11646163699

3 https://tffblog2011-2017.transnational.live/2016/10/27/stockholm-international-peace-research-institute-sipri-at-50-now-change-it-to-simsi/

4 https://transnational.live/2022/04/15/the-us-has-been-at-war-225-out-of-243-years-since-1776/

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